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13 décembre 2019

Du pied gauche

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La vieille cafetière rote crache et bave le canari la prend pour sa femelle

 

Le bois coupé en mauvaise lune pète et empeste dans la cheminée

 

Les lunettes sont parties se faire voir ailleurs

 

Le journal noircit le bout du nez

 

Pas de bons morts aujourd’hui dans la rubrique nécrologique pas de traitres pas de collègues malveillants pas de petits chefs vicieux pas d’arrivistes

 

Juste des inconnus sympathiques allez savoir

 

Demain ça ira mieux demain sera un autre jour un jour de moins

 

Photo Christian Cottet-Emard

Extrait de Poèmes du bois de chauffage, © éditions Germes de barbarie 2018.

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08 décembre 2019

Mon poème du deuxième dimanche de l'Avent (extrait)

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De ma prairie comme d’un îlot je vois l’église de mon village croiser dans le flot des nuées

 

Le clocher est le mât dans les jours calmes ou de tempête

 

Et voici dans la brise ou le vent l’alerte joyeuse des cloches

 

Celle du hameau dans la forêt où l’ombre tremble autour d’un cierge

 

Aussi le carillon des grandes villes qui pétillent en attente de la Fête

 

Et pour les temps de gloire l'Arche et la Nef en un même vaisseau

 

Extrait de Mes poèmes de l'Avent, © Éditions Orage-Lagune-Express, 2017, tous droits réservés.

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Photos : L'église de mon village vue depuis ma fenêtre. (Photos Christian Cottet-Emard)

05 décembre 2019

Carnet / Une leçon de Venise

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Venise est bien sûr la ville de ce que j’appelle des moments à poèmes, ces étranges épiphanies somme toute assez rares dans une vie et qui surviennent aussi dans les endroits les plus inattendus. L’une d’elles a saisi le jeune homme flottant dans un imperméable gris à la mode des années 80 que j’étais ce soir-là dans un arrêt de vaporetto.

À l’intérieur de ces petites stations flottantes reliées au quai par une passerelle, règne à cette heure tardive une atmosphère d’atelier où l’on a oublié d’éteindre les néons.

C’est pourtant bien à l’éclairage jaunâtre des ateliers d’usine de ma bourgade d’origine, Oyonnax, que je pensais malgré moi avant d’entendre le moteur du vaporetto et le clapot sur sa coque.

Je ne sais pas précisément pourquoi cette pensée m’a rempli d’une joie aussi intense dans cet abri bercé par l’onde du canal et dont les vitres exposées aux embruns me renvoyaient le pâle reflet d’un jeune touriste insignifiant qui se prenait pour un roi du monde au seul prétexte qu’il était à Venise au lieu de croupir dans son lycée vétuste puis dans les locaux blafards de l’industrie où risquaient de déboucher des études trop tôt interrompues.

Je suis au moins certain qu’en ce qui me concerne, mon obsession de Venise n’est pas pour rien dans la chance qui m’a permis d’éviter ce funeste destin. Il ne s’agissait pourtant que de monter dans le dernier vaporetto du soir, celui qui, cependant, ne risque pas de vous emmener là où vous ne voulez pas aller.

 

Extrait de Carnet vénitien © Club et éditions Orage-Lagune-Express 2014.

Photo : Venise, années 80, en attendant le dernier vaporetto du soir. (photo M.)